Une forme nouvelle de bibliothèque
Dans la thèse qu’il a soutenue en 1972 , Jean Hassenforder montrait l’émergence d’une forme nouvelle de bibliothèque, caractérisée par un rôle éducatif.
Ce thème, avant-gardiste à cette époque, est de nos jours abordé dans de nombreux ouvrages et revues professionnels. Le bibliothécaire a désormais un rôle pédagogique à jouer par les méthodes qu’il met en œuvre pour accueillir, orienter, renseigner et informer les usagers. Ces usagers doivent se familiariser avec les outils de la bibliothèque, s’approprier son espace, comprendre son classement (qui varie d’un établissement à l’autre) et utiliser le fichier manuel ou le catalogue informatisé.
Les termes « pédagogue » et « bibliothécaire » semblent n’avoir aucun lien entre eux. Cependant, puisque le pédagogue est quelqu’un qui aide l’enfant à acquérir un savoir, tant à l’école qu’à la maison, ne désigne-t-il pas, finalement, celui qui accompagne ? On peut alors se demander si, dans certains cas, le bibliothécaire ne joue pas ce rôle d’accompagnateur vers le savoir.
Lieu de socialisation, la bibliothèque est un espace où se construisent aussi les réalités sociales et culturelles. Dans ses travaux, Émile Durkheim considère que les institutions ont une fonction socialisante. Il définit la socialisation comme une des médiations majeures de l’intégrité collective, et s’intéresse aux rôles spécifiques tenus par la famille, l’école et l’État, responsables de la transformation des enfants en membres actifs de la société. Pour lui, l’éducation est par essence un phénomène social, elle constitue un des temps privilégiés d’intégration et de socialisation. Émile Durkheim exprime cette conception dans sa définition de l’éducation : « C’est l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu social auquel il est particulièrement destiné ».La bibliothèque, de ce fait, est traitée comme une institution de socialisation et d’intégration. Or, si le rôle conservateur et l’espace cloisonné des bibliothèques de l’époque de Durkheim laissent penser que cette description ne les concerne pas, le message du sociologue prend tout son sens actuellement, l’institution scolaire n’étant plus qu’un des éléments du système éducatif, auquel il faut ajouter les « bibliothèques, qui s’ouvrent de plus en plus vers l’extérieur » .
Il est difficile de donner une définition appropriée et fédératrice de la pédagogie, car cette pratique est en perpétuel mouvement. Elle doit permettre à un savoir de devenir une compétence, mais les connaissances évoluent et fondent de nouvelles méthodes. La pédagogie est formée de l’ensemble des didactiques, qui sont aussi nombreuses que les matières à enseigner. Elle cherche à répondre à la question : comment le sujet s’approprie-t-il le savoir ? En ce sens, elle constitue un ensemble de connaissances rigoureuses, aptes à déterminer le comportement quotidien du pédagogue.
Le pédagogue – bibliothécaire – doit donc être sociologue et se soucier de la microsociété que représente le public, en respectant les lois de bon fonctionnement des groupes et des sociétés, ayant pour but de maintenir un milieu favorable à la réussite scolaire ou culturelle. Le bibliothécaire accompagne le développement du public, et devient son éducateur. La psychologie est l’outil de compréhension qui sous-tend sa pratique pédagogique. Jean Hassenforder définit le rôle du bibliothécaire comme un véritable « encadrement d’étude ».
La pédagogie, notion de contrat didactique, décrit la situation triangulaire dans laquelle se trouvent les bibliothécaires, les usagers et les savoirs ; les rôles de chacun, constitutifs de la relation pédagogique, sont absolument à respecter, faute de quoi il n’y aura pas d’apprentissage. C’est pour cette raison qu’a été étudié de manière théorique chaque aspect de ce triangle pédagogique.
Cependant, il faudra à l’avenir intégrer l’élément clef dans cette relation à trois : l’inconscient. Dans ce cas, on parlera de losange pédagogique , dans lequel les acteurs sont en interaction permanente face au savoir, et où interviennent surtout la façon dont ces acteurs se représentent ces connaissances, et la vision qu’ils ont de leur interlocuteur.
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